La directrice du Goethe-Institut Kamerun explique comment l’institut enrichit la scène culturelle camerounaise et accompagne les jeunes talents.
Quelle est la mission principale du Goethe-Institut Kamerun et comment s’inscrit-elle dans le paysage culturel et éducatif du pays ?
Le Goethe-Institut a pour objectif général la promotion de la langue allemande et la coopération culturelle entre l’Allemagne et le Cameroun. Il est structuré en trois grands départements. Le premier est le département de la langue, qui se divise en deux sous-départements : l’un se concentre sur les cours de langue et les examens internes, tandis que l’autre, le département de la coopération linguistique, collabore avec le MINESEC et les systèmes éducatifs camerounais, notamment dans les écoles secondaires, pour promouvoir et soutenir l’apprentissage de la langue allemande. Le second département est celui de l’information et de la bibliothèque, qui gère des projets culturels et éducatifs, et offre des services similaires à ceux d’une bibliothèque ou d’une médiathèque. Actuellement, ce département est en pleine évolution, comme vous pouvez l’imaginer. Enfin, le département de la coopération culturelle traite des questions de collaboration artistique, principalement dans le domaine de l’art contemporain. Il développe de multiples projets, parfois selon des thématiques spécifiques, parfois en fonction des genres et des disciplines artistiques, cherchant à établir des synergies entre les artistes.
Quels types de programmes culturels et éducatifs propose actuellement le Goethe-Institut Kamerun propose actuellement et en quoi ces initiatives répondent-elles aux besoins spécifiques de la communauté camerounaise ?
L’Institut Goethe propose des programmes éducatifs adaptés aux besoins de la communauté camerounaise, tels que des cours de langue allemande pour des raisons variées comme la réunification familiale et l’emploi en Allemagne. Il collabore avec le système éducatif en offrant des formations continues pour les enseignants et des bourses pour des stages en Allemagne. Le projet “Think Professional” permet aux élèves de faire des stages dans des entreprises locales, élargissant leurs horizons professionnels. L’Institut soutient également les jeunes artistes avec des programmes comme “Goûte découverte” et des initiatives pour les cinéastes, telles que “10 jours pour un film”. La bibliothèque de l’Institut est en cours de rénovation pour mieux soutenir les étudiants, avec des programmes de développement de compétences sociales et numériques pour les préparer au marché du travail. Ces initiatives impactent significativement la communauté camerounaise en offrant des outils d’apprentissage et de développement personnel pour un avenir professionnel enrichissant.
Quel impact pensez-vous que l’exposition “Il était une fois…la naissance du Staat Kamerun” aura sur la mémoire collective au Cameroun et sur les discussions concernant notre histoire commune ?
L’exposition “Il était une fois… la naissance du Staat Kamerun” a le potentiel d’avoir un impact significatif sur la mémoire collective au Cameroun. En ouvrant un dialogue entre faits historiques, objets traditionnels et art contemporain, elle permet d’aborder la période coloniale d’une manière nuancée, en mettant en lumière les transformations sociales, culturelles et économiques qui en découlent. Cette approche favorise une réflexion sur les conséquences de l’administration coloniale allemande et ses répercussions jusqu’à aujourd’hui. En invitant différents groupes à participer à des ateliers et à des débats, l’exposition encourage un échange intergénérationnel et interculturel qui peut enrichir la compréhension de l’histoire camerounaise. Cette initiative pourrait non seulement renforcer la mémoire collective, mais aussi favoriser des discussions constructives sur les défis contemporains liés à cette histoire partagée.
Comment le Goethe-Institut Kamerun soutient-il concrètement les artistes camerounais ?
Les lauréats de nos programmes bénéficient de collaborations qui favorisent l’échange entre l’Allemagne et le Cameroun, essentiel à notre mission. Nous soutenons les jeunes artistes dans un contexte difficile, où les opportunités de formation en arts sont limitées. Nous créons des plateformes de développement artistique reliant jeunes talents et artistes établis, facilitant des collaborations au-delà des frontières camerounaises. L’Institut Goethe travaille également avec d’autres instituts en Afrique subsaharienne, comme ceux du Nigeria, du Togo et du Kenya. Un exemple est le programme “Moby Arts”, qui permet aux artistes de faire des tournées dans plusieurs Goethe-Instituts, leur offrant visibilité et opportunités. Grâce à notre statut, nous surmontons les barrières linguistiques, et cette diversité culturelle enrichit notre scène artistique, que les artistes pourraient exploiter davantage.
Pourriez-vous nous parler des initiatives écologiques mises en place par l’Institut dont vous êtes à la tête, et de leur importance dans votre démarche ?
Nous n’avons pas encore de grands projets en tant que tels, mais le thème de l’écologie est crucial pour notre institut à l’échelle mondiale. Actuellement, nous installons des panneaux solaires pour réduire notre consommation d’électricité, ce qui nous permettra également de faire face aux coupures en évitant de recourir à des groupes électrogènes. Nous cherchons également à réduire l’utilisation de bouteilles en plastique dans nos projets. Par exemple, lors de nos événements, nous remplaçons les petites bouteilles par des carafes et des verres. Ces actions, bien que modestes, marquent le début de notre engagement écologique. Depuis la pandémie, cette réflexion est devenue encore plus pertinente au sein du Goethe-Institut, avec une volonté de réduire notre empreinte carbone. Nous proposons également de nombreuses formations en ligne pour nos employés, contribuant ainsi à cette démarche.
Quels sont les principales innovations observées depuis que vous êtes à la tête du Goethe-Institut Kamerun ?
C’est une continuité. Nous ne changeons pas notre fonctionnement et nos projets simplement en raison d’un nouveau directeur ou d’une nouvelle directrice. La démarche de développement de projets est collaborative et se fait en équipe. En tant que Goethe-Institut, nous restons une institution indépendante, mais certains sujets clés sont négociés avec le ministère des Affaires étrangères en Allemagne, puisque nous représentons officiellement l’Allemagne sur le plan culturel et innovant à l’étranger. Nous travaillons souvent sur des thèmes et des thématiques clés définis pour une période de 4 à 6 ans, selon les cas.
Comment les jeunes accueille t-ils les projets de médiation culturelle et quels sont les sujets qui les interpellent particulièrement ?
Les jeunes artistes camerounais montrent un réel enthousiasme pour la culture allemande, et nous souhaitons soutenir leur développement artistique. Pour ceux qui veulent se lancer dans la peinture, nous organisons des ateliers, des séminaires et des résidences, y compris en Allemagne, ce qui suscite un grand intérêt Nous nous efforçons de mobiliser un public jeune, malgré les défis liés aux réseaux sociaux qui dissuadent souvent d’assister à des événements sans grandes têtes d’affiche. Nous créons des espaces pour que les jeunes artistes présentent leurs travaux et discutent de thèmes sociopolitiques. Un exemple est notre projet “Il était une fois la naissance du Staat Cameroun”, qui examine l’histoire allemande au Cameroun à travers une perspective camerounaise. Trois curatrices explorent des œuvres contemporaines tout en réfléchissant sur des objets d’art restitués des musées allemands. Ce projet génère un vif intérêt et permet des échanges enrichissants entre les jeunes, favorisant le dialogue et le débat.
Quels défis avez-vous rencontré lors de la vulgarisation des plateformes d’apprentissage en ligne ?
Bien que la plateforme existe depuis 10-15 ans, nous avons longtemps privilégié les cours en présentiel, rendant l’adoption de l’apprentissage en ligne difficile. Reconnaissant les avantages des plateformes numériques, comme la flexibilité, nous avons intégré un système de blended learning il y a quatre ans, combinant 5 % d’enseignement en présentiel et 95 % en ligne via Moodle. L’adaptation des étudiants a été un défi, car beaucoup étaient réticents à l’apprentissage en ligne, craignant de perdre le soutien direct des enseignants. L’accessibilité à Internet au Cameroun a également posé problème. Certains collègues préféraient l’ancien système. Cependant, cette transition a permis d’augmenter notre capacité d’examen pour répondre à une forte demande, notamment pour les visas. Pour surmonter ces défis, nous avons formé nos enseignants afin qu’ils soutiennent les étudiants. Même si les cours ne sont pas toujours en présentiel, l’interaction demeure une priorité, favorisant un environnement d’apprentissage collaboratif et efficace.
Quelle est votre vision à long terme pour le Goethe-Institut ici, au Cameroun ?
Les différents objectifs que nous nous étions fixés en venant ici aujourd’hui ne sont pas uniquement mes objectifs personnels, mais ceux de l’institution dans son ensemble. Personnellement, je pense que la relation entre le Cameroun et l’Allemagne est très productive et se caractérise par un respect mutuel. Il existe également un réel intérêt des deux côtés pour maintenir des échanges et des rencontres, et pour continuer à collaborer. Pour nous, c’est une démarche constante.